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The Indian Adventure

#the sounds of india

 

The Indian Adventure

#the sounds of india

 

The Himalayas -


ok. dimanche après-midi. c'est à peu près un bon moment. je vous/me dois un long mot. le temps entre mes pieds dans les himalayas, avec mes oreilles qui se reposaient auprès de Louis-Jean Cormier qui chantait « j’t’expose ma tête, mes yeux, mon coeur et mes mains, si tu reviens » et aujourd'hui a coulé en torrent, sans trop que je ne le saisisse. déjà, je sens que ce voyage prendra forme à mon retour. lorsque je ne serai plus sollicité, tiré de tout bord dans le mouvement infini d’aujourd’hui, mais surtout de demain. pour l’instant, sur le campus, c’est comme être attaché à des skis derrière un bateau - tu regardes pas le paysage (mais quel magnifique bateau !). tu t’accroches en essayant de ne pas t’étouffer et de bien emplir tes poumons. ——— je reviens sur les montagnes, avant d’aller plus loin. —— ça a commencé dans la chaleur du sud. assis, tout le temps assis. sur le banc sale de l’autobus qui nous amenait à mumbai - puis sur le siège de l’avion - et celui de l’autobus d'après, puis de l’autre et de l’autre encore. demain, on sera à la montagne - l’air changera, ce sera frais. parce que l’air de l’endroit où on était, c'était un air de poussière. de l’air de bruit - de trottoir sale et de pétrole. les routes sont des champ de mines et les suspensions fantomatiques. d’ailleurs, la vitesse se limite à 80. par-dessus ça, on décollerait pour les nuages. ou on éclaterait les pneus. dans les rues, des gens marchent autour de toi, urinent, quêtent, mangent, vendent, dorment, marchent, urinent, quêtent et parfois te regardent. c’est comme une fourmilière, sauf que c’est toi la fourmis. ——-- quand on est arrivé au 1er campement, il faisait nuit déjà. et après 40 heures de voyage, nous sommes sortis des jeep de jurassic park qui nous ont fait filé à travers les derniers kilomètres à des vitesses frôlant celle du son, heureux. sauf que le ciel a décidé qu’il était temps de nous tomber sur la tête. petite pluie. on sort les tentes. puis moyenne. on court à travers les roches pour trouver un endroit plat. puis grande. on crie, on s’habille, on sort les piquets. puis déluge. ayayaye. quel mauvais départ ! moi, je cours partout. et tout le monde court partout. sauf ceux sans expérience en camping qui gelés par les éléments restent plantés debouts et attendent. « couvrez-vous ! - OK ! » certains entrent dans les tentes qui sont montées - mais ils sont tous trempés, alors ils mouillent tout. et on se retrouve en moins de 15 minutes, tous et chacun transpercé d’eau avec des tentes transpercées d’eau. welcome to the himalayas. heureux encore qu’une équipe merveilleuse de guide avec des mules nous suivent et nous cuisine des repas chauds servis sous une grande tente. le plus souvent sec. ce soir là, la soupe fût bonne. le ciel s’est dégagé. et les étoiles ont pointé leur nez. nous nous sommes couchés mouillés, mais pas gelés. c’était déjà ça de gagné. et de toute façon, on était tous tellement fatigué qu’on a à peu près tous dormis comme des roches. —— matin #1. mise en marche. 12km. sans histoire. un petit village traversé, des enfants en uniformes qui jouent et nous regardent passer. des ânes et des arbres décorés. des femmes qu’on ne voient pas et qui chantent. des antennes satellite au coin des toits. du blé rouge et rose planté partout. sur ma droite, au tournant d’un petit sentier, des femmes habillées de robes magnifiques travaillent dur, transportent des pierres sur leur tête ou des branchages qui doivent peser 40kg. nous arrivons tôt au campement. tranquilles, au sec, ciel bleu - nous sommes tous allés sauter dans la rivière glaciale. une fille en a même profité pour se laver les cheveux. je me suis fait piqué par une guêpe et je ne l’ai même pas senti tellement j’avais les fesses gelées. ce soir là, autour du feu, un papillon de nuit est venu s’écraser dans le feu émettant un dernier cri avant de mourrir - notre attention s’est aussitôt tourné vers lui « quelle belle mort ! - quoi ?! - combien d’insectes ont la chance de mourrir si bien entouré ? - et combien d’insectes ont la chance d’être salué ? » et moi d’ajouter simplement, à le demi-blague : « comment vous pensez qu’il se réincarnera ? - tu crois en la réincarnation ? - i don’t know. you ? - well… » et s’en suivra une magnifique conversation. imaginez. deux bouddhiste, un catholique, un mulsuman, trois hindous et pleins de chercheux de sens assis ensemble autour d’un feu, 18 âmes de partout dans le monde - asie, amérique du sud, centrale et du nord, afrique, europe - le visage éclairé par la lueur du feu qui aborde le sujet de la mort, c’est quoi la mort, tu vas où après, et c’est quoi dieu, c’est quoi croire, c’est quoi le sens, et pourquoi, et toi ? pis toi ? et toi ? dans le sourire, la conversation s’est terminé tard - quel bonheur. dodo au sec ce soir là. --- réveil. saut à la rivière. déjeûner. et longue marche. le groupe se divise en trois. les rapides. les moyens. et les plus lents. dont je fais parti. les premiers marchent si vite que je demande combien de temps ils tiendront. ce jour là, je me sens bien. je me laisse porté par les arbres et les vallées - qui passent de l’été à l’automne au tournant d’un versant, je me retrouve dans la forêt laurentienne, l’odeur, l’orange des feuilles au sol et l’humidité de l’air, je suis au québec, mais j’avance sur le flanc de la montagne et regarde un arbre au loin et voit découpé en contre-jour un énorme singe, la queue pendu vers le sol, qui me regarde, je suis de retour en Inde. on suit le tracé étroit du tour de la montagne, puis de l’autre montagne, de temps à autre, je m’arrête, sors mon enregistreuse, enfile les écouteurs, et enregistre ce qui m’entoure, des insectes musiciens, et des espaces très grands, il y a toujours une rivière au loin qui berce le solo des insectes et des oiseaux, je marche, tranquille, de toute façon, mon genoux gauche est sur le bord de me faire mourrir, depuis le matin, une vieille douleur qui remonte à l’Espagne et les chemins de compostelle refait surface, je ne peux pas plier ma jambe, heureusement, mon cher compagnon de route ce matin là, Vilhem, garçon de 17 ans qui doit faire 2 mètres, carré comme un frigidaire, cheveux longs et blonds, danois aux yeux verts, magnifique et qui me montre par contraste à quel point j’étais con quand j’avais son âge, m’a trouvé un magnifique bâton de marche qui trainait à quelques mètres du sentier, au milieu d’herbe hautes, de toiles d’araignées, sous un arbre glauque, et à flanc de falaise, il a enlevé son sac et me l’a attrapé un peu au péril de sa sécurité - heureux, heureux, suis-je, parce que sans ce bâton, je n’avance pas, j’avance donc à petits pas heureux, il y a une partie de moi qui s’ouvre à quelque chose de nouveau, quelque chose de calme, je pense à Adé, je pense à ma famille, à ma famille d’amis merveilleux, sans souffrir de leur absence, plutôt avec un énorme sourire, même en sachant que je m’enfonce dans la nature sauvage et lointaine, et ce sentiment habituel d’attachement se transforme en sentiment de support et d’appartenance, je les sens près de moi et ça me rend heureux, l’hypocondrie ne s’approche pas, ou presque, c’est son moment préférer pour me faire peur, lorsque je m’enfonce loin dans la nature, quand elle s’approche, je lui demande de partir, et elle part - tais-toi, dis-je et elle se tait. alors je marche en écrivant des poèmes légers dans ma tête et me trouve l’homme le plus chanceux de l’univers, je m’arrête devant le temple dédiée à la colère de Shiva, écoute les arbres qui parlent, et puis reprend route jusqu’au campement avec 1 heure de retard sur le premier groupe. ----- le lac qui s’ouvre devant moi est celui où on dit que Ganesh est né. je trouve ça pas mal cool. la montagne, la grosse, juste là, à droite, c’est même une des résidences de Shiva, c’est encore plus hot. on prend des photos. on mange. on fait un feu. ce soir là, on fait tour de feu : « chanson de chez soi ». tout le monde chante des musiques traditionnelles. moi comme un con, je leur apprend une chanson du Mali. c’était beau. mais c’était vraiment pas une chanson de chez moi. je vais me reprendre bientôt. j’ai presque honte. après 16km et 8 heures de marche ce jour-là, dodo. --- matin #3 du trek. hier c’était la journée longue. aujourd’hui c’est la journée difficile. 7km, 6km de montée, 1km de descente à la fin, 1200m de dénivelé. on est à 3000m et on dormira à 4000m en passant par une traverse à 4200m. je passe me faire bénir par le prêtre. puis départ. je me tiens derrière. le premier groupe est en feu. je m’occupe des plus lents. je trouve des bâtons pour d’autres qui travaillent fort. et on marche. ça monte. on suit le cour de la rivière qui se déverse dans le lac, puis qui repart en rivière jusqu’au Gange. monte. monte. puis monte encore. l’oxygène se fait plus rare. et les pas ralentissent lentement, mais surement. au bout d’une heure ou deux, je vois au loin notre équipe de cuisinier parti une heure après nous qui arrive avec les mules, ils marchent à un rythme phénoménale et me rattrapent en 5 minutes, nous sommes déjà loin derrière le premier groupe, et je suis avec Dang et Nicole. Dang est du Cambodge. et je l’adore. il a un coeur gros comme l’univers. un sourire inaltérable. et une curiosité infini. on parle photo, canada, montagne, voyage, famille, cambodge, religion, sport, littérature et tranquillement on avance. Nicole vient d’Israel. elle ne va pas très bien. elle a mal au ventre, et sa tête lui répète « i can’t do this, i can’t do this » et pour le coup, la journée est pas facile, la brume arrive, le froid, puis la pluie, viendra la grêle, et chaque tournant de colline, nous montre le haut de la montagne qui semble hors d’atteinte, c’est-tu là qu’on va ? c’est-tu là ? toujours pas. on s’arrête chaque 20m. et comme nicole nous fait le coup de la plainte continuelle pour une deuxième journée de suite, j’ai épuisé mon répertoire de mots encourageants - comment être aidant subtilement, comment la pousser plus loin, comment lui conseiller de changer ses mots sans lui dire : « try to say « I can » instead of « i can’t » » pendant que je me médite sur la meilleure façon de l’amener plus loin qu’elle-même, Dang, lui, prend les choses en main, pendant une nouvelle pause, je me retourne et le vois à genoux, dans la grêle, en train de masser les jambes de Nicole, il sort ses crèmes, ses pilules, tout ce qu’il a pour essayer de l’aider, et sans arrêt, pour les 2 heures qui suivront, il l’encourage, je souris et le laisse prendre en charge, ils sont ici pour ça de toute façon, se découvrir dans la difficulté et dans l’extrême, on marche les trois, moi devant, Nicole, puis Dang. et éventuellement, c’est le sommet qui se trouve sous nos pieds, et le paysage s’ouvre à 360 degré - c’est beau et c’est gros. une petite pensée anxieuse fait surface quand même à chaque fois que le tonnerre éclate et me rappelle que sur un plateau à 4200m d’altitude, je suis une cible pas pire pour la foudre, mais je me dis que je porte pas de rouge, c’est mieux, non…? --- sous la grêle, on marche le dernier kilomètre et rejoignons le campement qui commence à se monter - on a juste le temps de monter les tentes et de se lancer dans celles-ci avant que la tempête, la vraie, éclate, pendant les deux heures qui suivront, le ciel nous laissera tomber une grêle soutenue et lourde, deux tentes s’écrouleront, la nôtre y passera presque, et pendant qu’on écoute la tempête frapper la toile, je pense à Aparna et à Vanisha qui sont derrières, en retard, avec le troisième guide, je me dis qu’elles se sont surement mises à l’abri en attendant le calme... j’aime pas trop la situation, il fait déjà froid, et pour la plupart, c’est la première fois qu’ils voient de la neige, et là, ils l’ont jusque dans leur fond de culotte, et habillés de coton, trempés aux os par la journée déjà difficile, ils ont froid, et leur tente, quand elle ne s’écroule pas, coule de partout, certain ont des sleeping bag pour une température de 15 degré, ils ont utilisé toutes leurs paires de bas, et il n’est que 16h. la tempête faiblit un peu, j’en profite pour rejoindre la grande tente et manger le riz et le dalh qu’on nous sert pour le lunch tardif, j’ai la bouche bien pleine quand par la porte apparaissent Aparna et Vanisha - un silence s’installe. on les regarde entrer. on pose des questions auxquelles on obtient pas vraiment de réponse, elle sont transpercées. elles ne savent pas trop quoi faire et semblent un peu confuses, Aparna hoche de la tête, regarde à gauche, à droite, à gauche, décide de s’assoir à ma droite, puis éclate en sanglot - Magalie, la belge qui aide tout le monde tout le temps, me regarde avec de grands yeux qui m'interpellent, et on saisie au même moment l’un et l'autre la relative gravité de la situation. ça fait deux heures qu’elles s’éprouvent à grimper une infini montagne, habiller de presque rien - et ce ne sont pas deux canadiennes, mais deux sud-indiennes, je me lève d’un bond et avec Magalie, on prend la situation en charge, j’enlève 6 de mes 7 couches, manteau, sous-manteau, sous-sous manteau, chandail 1 et 2, Magalie trouve une serviette et s’attaque à leur tête pour essuyer leur cheveux trempés, on leur enlève tout leur vêtements, manteau, chandails, on les cache derrière des serviettes, pour qu’elle enfile n’importe quoi de sec, il faut les forcer parce qu’elles ont aucune envie de bouger, elles sont figées dans le froid, prête à s’endormir, j’ai les larmes aux yeux devant Aparna qui continue de pleurer, ce sont des sanglots de peur accumulée, les guides arrivent en courant avec des soupes chaudes, on leur réchauffe les mains, et tranquillement, on arrive à les réchauffer, elle reprennent des couleurs et recommencent à nous parler et à être là, ouf. --- ce soir-là, le couché de soleil nous donnera la plus belle tempête de neige que j’aie vu. à l’ouest, entre les montagnes, le soleil tombera au-dessous de la couche de nuage épaisse, laissant enfin passer ses rayons et nous donnant un triangle à l’horizon d’un jaune-orange magnifique, les flocons de neige s’illumineront eux aussi alors qu’au sud, les montagnes apparaîtront comme des fantômes en teinte de gris et de mauves, avec de très fins nuages qui semblaient danser sur leur flanc. la soirée se terminera devant un feu, dans l’étable sans toit et sans mur, où deux ânes se réchauffent avec nous, avec au-dessus de nous, les étoiles, la voie lactée, et l’infini, on se dit tous intérieurement que Jésus a dû naître dans le même décor, l’étable, le feu, les ânes et les étoiles, manque que les trois chamans - on se couchera sous 0. et on se réveillera dans la glace et la neige. mais quel réveil ! les montagnes sont dégagées de partout et bientôt, ça se sent, le soleil dépassera la cime des géantes himalayas et il fera chaud. l’humeur est bonne. en plus, aujourd’hui c’est le début du retour. on a eu la plus longue journée le jour 2. la plus dure, le jour 3. et aujourd’hui, nous sommes supposés monter un peu, puis redescendre tranquillement vers le dernier campement du voyage. 16km, mais presque tous en descente. si seulement on nous avait dit que ce serait à la fois la plus longue et la plus difficile journée… nous sommes partis souriants sous le soleil tapant, en manche courte et le coeur léger. le sommet n’était pas si loin. 300 ou 400m plus haut. et même si l’altitude en frappait quelques-uns entre les diarrhées de l’un, la constipation de l’autre, les nausées de l’unes et mes vertiges, on se disait que juste de l’autre bord, ce serait facile. mais le temps passait. et arrivés au sommet, on voyait déjà le ciel se transformer. arrêt sur photo au sommet. puis les pieds mouillés, mais encore au chaud, nous avons entrepris rapidement la descente. ça glissait. avec à notre droite le vide et à notre gauche le flanc de la falaise. pas de marge d’erreur et l’épaisseur de neige nous transformait en skieur. j’y ai d’ailleurs brisé mon fidèle bâton qui m’a aussi permis de ne pas me péter la face complètement et de tomber tranquillement sur le flanc gauche. ce jour-là, le premier groupe n’existait plus trop. il y avait un seul groupe et quelques marcheurs très lents derrière. si jusqu’à ce jour, nous les avions toujours attendus au campement, soupe à la main et sous les tentes, ce jour-là, les guides avaient décider de les attendre sur le chemin. le temps changeait et nous nous arrêtions pendant des périodes de 30, 40, voire 60 minutes pour attendre ceux qui marchaient derrière. le moral commençait à changer. les pieds se mouillaient et le froid commençait à pénétrer les corps. la fatigue nous frappait tous de plein fouet. et plutôt que de descendre vers le chaud, nous remontions tous ce que nous avions descendu si rapidement. à nouveau, nous montions, mais cette fois avec aucun plaisir - l’altitude rendait mes pas si lourds et si petits ! et l’horizon de brume ne nous permettait pas d’apercevoir un quelconque espoir de descendre quelque part. devant nous s’est dressé une autre montagne - je croisais les doigts pour que ce ne soit pas celle que nous allions traversée. et évidemment, ce l’était. j’ai sacré un bon coup. en français. puis en anglais. puis à nouveau en français. estie. je suivais le guide avec derrière moi le géant danois et puis, éparses, tout le reste de la bande qui tranquillement, durement, avançait. restait l’espoir cette fois que ce soit la dernière montée et qu’on commence la descente. sauf que là, le guide a décidé que la crête serait l’endroit où on attendrait les derniers. là ! dans les nuages, la grêle, le froid, où le vent nous frappait des deux côtés, les pieds transpercés, congelés, fatigués et affamés. fuck - c’était à la fois con et dangereux et vraiment une chose de base à ne pas faire en montagne quand il y a d’autres options (s’arrêter mouillé, exposé, à flanc de montagne) j’étais pas content. j’ai essayé de négocier avec le guide sans succès. et dans la brume, se débrouiller sur le chemin tout seul n’était pas possible. fac. on a poireauté 1 heure notre énergie a baissé en éclair. on a avalé au bout de cette heure un bout de riz et de chapati. et on a repris route épuisé et déprimé. descente, descente, montée, descente, neige, pieds trempés, froid, pluie, fatigue, mal de tête, nausée, altitude, vertige, vide, dégringolade, descente, estie on est où. et pis marche et pis marche et pis marche. le début des arbres encore tellement bas et nous si haut dans la neige. et pis marche. et pis marche. on s’est arrêté beaucoup plus bas, 2h ou 3h plus tard, près d’une petite maison sans toit où nous avons fait un feu en attendant à nouveau les autres. moi, je me suis écroulé par terre, loin du feu, seul, la tête sur mon sac et regardant les montagnes. j’avais les larmes aux yeux - je voyais mes limites grosses comme des murs et je savais qu’il nous restait encore de la marche à faire - il était 17h45, le soleil tombait, il faisait froid et nous marchions depuis déjà 8 heures. au loin je regardais un petit espace où il y avait des branchages, d’un coup j’ai vu une tête de lion se dessiner à travers les branches, j’ai pensé « courage » puis aussitôt pensé, le lion s’est transformé en loup, j’ai pensé « adélaïde » puis le loup est disparu, plus rien, plus l’ombre d’une tête de quoi que ce soit dans les arbres, j’ai pleuré, ça a fait du bien, me suis dit que j’avais eu ma première hallucination à vie et qu’elle était belle, me suis levé et suis retourné retrouver mes compagnons de montagne - nous avons terminé la journée à la lampe frontale, dans le noir de la jungle himalayenne, nous sommes descendus, roche par roche par roche, bouette jusque dans la face, les ampoules se creusant sur le bout des orteils, pendant 3 longues heures, pour arrivé au milieu d’un champ de vaches où les tentes et des soupes chaudes nous attendaient - il était 21h. 11 heure de marche. avec un chapati et une motte de riz dans le ventre - quelques-uns se sont écroulés dans leur tente, les autres ont mangé, pendant que Dang et Magalie s’assuraient que tout le monde était au sec et que tout le monde, même couché dans les tentes, avait une assiette pleine - nuit noire. ----- matin clair. jour 5. route du retour tranquille et ensoleillée. heureux, nous avons retrouvé un autobus et nous sommes écroulés dans celui-ci pour reprendre la route jusqu’à Deradhun - nous avons sillonné les flancs des himalayas à vive allure pendant 8h. à chaque tournant, je me demandais si nous allions finir dans la rivière 350m plus bas, parce qu’ici les gardes-fous n’existent pas vraiment, la route est une route presque pour une seule voiture, et la tradition veut qu’il faut klaxonner en arrivant au tournant, sauf que tout le monde klaxonne, mais personne ralentit ! tu passes alors ton temps entre la vie et la mort qui se tient juste là, à une mauvaise ou une bonne fraction de seconde devant toi, tu finis par lâcher prise, ou par t’endormir. sauf que pour t’endormir, il faut pouvoir supporter le mouvement incessant et violent de l’autobus qui traverse courbes et kilomètres à vitesse folle, et le son du klaxon qui toutes les 15 secondes t’avertit d’une mort possible - mais c’était beau. on est arrivé à Deradhun à 20h. avons mangé dans un hotel où le serveur/réceptionniste écoutait la télévision dans la salle à manger aussi fort qu’un show de Metallica. les toilettes à notre droite sentaient jusqu’à nous, et le savon, laissé sur le coin du lavabo, arrivait droit de la première guerre mondiale, heureux, étais-je, d’avoir le mien. j’ai mangé du paneer. et c’était trop bon. à 21h30, j’ai traversé mon premier boulevard indien en me demandant si c’était possible d’y survivre, il faut imaginer 5 ou 6 voies, pas officielles, avec des taxis à trois roues, des motos et toutes sortes de véhicules, incluant des charrettes tirées par des boeufs, qui arrivent à vive allure et devant lesquelles tu dois te lancer pour traverser. ouais. c’est juste ça. tu te sacres devant. pis t’espères. à 21h40, j’allais acheter douze bananes pour 100 rupees. mais Aparna, mon amie indienne, est arrivé en courant et a fait comprendre au vendeur que je l’achetais pour 30 rupees et c’est tout. oh well. à 21h55 j’ai appelé adé sur le quai de la gare. puis à 23h30 nous avons sauté sur un premier train qui nous a déposé à 5h45 à New Delhi. heureusement, c’était un train avec couchette - nuit courte et confortable. débarqué sur les quais infernaux de New Delhi, nous avions 5 heures à tuer. nous avons somnolé un temps. assis sales et épuisés sur nos sacs. nous sommes sortis quelques-uns d’entres nous manger dans les restos environnants la gare. j’ai mangé un Aloo parantha. c’était bon. mais il ne fallait pas regarder la guenille avec laquelle il venait d’essuyer mon assiette, ni les murs et encore moins le coin des murs, ni penser au fait que la cuisine se faisait sur le trottoir qui donnait sur un boulevard à 6 voies, ni regarder le tas de légumes qui trainaient à quelques centimètres d’une flaque d’huiles et du trottoir. non, non, il fallait juste manger. nous avons traversé un autre boulevard. puis avons sauté dans le train de 10h30. qui nous amena tranquillement, sans histoire, bercé par le son des vendeurs de chai, de sacs de chips, de dalh, de biscuits qui traversaient les allées toutes les 15 minutes, en nous amenant bonheur sucré et espoir de sortir un jour de ce train sans fin, nous sommes arrivés à Pune, le lendemain à 17h30. et de là, un autobus nous a ramené à MUWCI. arrivé : 19h15. 53 heures de trajet. (trek-MUWCI) après 5 jours de trek. après 40 heures de trajet. (MUWCI-trek) 2 jours après 21 heures de transport et une nuit blanche entre Paris et Mumbai. bonheur.

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